La responsabilité des administrateurs et la qualité pour agir au regard de la jurisprudence du Tribunal fédéral

En Suisse, la question de la responsabilité des administrateurs d’une société a une importance particulière vu le grand nombre de mandats d’administrateurs conclus en pratique.

Malgré l’importance certaine de cette institution, la réglementation de la responsabilité des administrateurs est en très grande partie jurisprudentielle. Proportionnellement au nombre important de mandats d’administrateurs, le nombre de jugements publiés reste toutefois relativement faible. Il ne faut cependant pas perdre de vue que la grande majorité des litiges relatifs à la responsabilité des administrateurs se règle par la voie transactionnelle[1].

Le principe de la responsabilité d’un administrateur est abordé principalement par le Code des obligations[2]. En effet, un administrateur peut voir sa responsabilité personnelle engagée à plusieurs titres. Nous citerons à titre d’exemples sa responsabilité d’auteur de prospectus d’émission (art. 752 CO), sa responsabilité en qualité de fondateur de la société (art. 753 CO) ou de liquidateur de celle-ci (art. 754 al. 1 CO). Le chef de responsabilité le plus courant en pratique restant toutefois celui rattaché à la qualité d’organe chargé de la gestion de la société (art. 754 al. 1 CO).

Il convient d’emblée de préciser qu’un administrateur peut aussi encourir une responsabilité pénale ainsi qu’une responsabilité en raison du manquement de la société dont il est administrateur dans le paiement des impôts ou des cotisations sociales.

L’article 754 alinéa 1 CO dispose que « les membres du conseil d’administration et toutes les personnes qui s’occupent de la gestion ou de la liquidation répondent à l’égard de la société, de même qu’envers chaque actionnaire ou créancier social, du dommage qu’ils leur causent en manquant intentionnellement ou par négligence à leurs devoirs ».

Il ressort de cette disposition que la responsabilité de l’administrateur est soumise aux quatre conditions de fond usuelles en matière de responsabilité[3]. L’administrateur doit d’abord avoir causé un dommage, soit une diminution involontaire de la fortune nette qui correspond à la différence entre le montant actuel du patrimoine du lésé et le montant qu’aurait ce même patrimoine si l’événement dommageable ne s’était pas produit. Le dommage peut se présenter sous la forme d’une diminution de l’actif, d’une augmentation du passif, d’une non-augmentation de l’actif ou d’une non-diminution du passif.

[1] Zen-Ruffinen Marie-Noëlle / Bauen Marc, Le conseil d’administration, 2017, N 816, p. 320.

[2] CO ; RS 220.

[3] ATF 127 III 453 ; ATF 113 II 52 ; Arrêt du Tribunal fédéral 4A_603/2014, du 11 novembre 2015, c. 4 ; Arrêt du Tribunal fédéral 4C.182/2006, du 12 décembre 2006, c. 3.3.

L’administrateur doit avoir causé ce dommage en violation de ses devoirs, ce qui correspond à l’exigence d’illicéité. Dans la plupart des cas, cela découle d’une violation des devoirs de diligence et de fidélité ou des devoirs résultant des tâches inaliénables et intransmissibles du conseil d’administration. À cet égard, il convient de préciser que le devoir de diligence est considéré comme respecté si la décision dommageable a été prise sur la base d’une information complète, au terme d’une procédure sérieuse, et si elle n’apparaît pas manifestement déraisonnable au moment où elle est prise. Dès lors, seule une analyse approfondie au cas par cas permettrait d’établir si cette condition est respectée ou pas.

Pour troisième condition, un lien de causalité adéquate doit pouvoir être constaté entre le comportement illicite de l’administrateur et le dommage.

Enfin, une faute doit pouvoir être reprochée à l’administrateur, cette dernière pouvant être retenue si l’administrateur n’a pas fait preuve de la diligence que l’on aurait pu attendre d’un administrateur modèle, diligent et raisonnable placé dans les mêmes circonstances[1]. La faute est toutefois présumée[2], ce qui renverse le fardeau de la preuve à cet égard. Il appartiendra en effet à l’administrateur de prouver qu’il a agi diligemment et qu’il n’a de ce fait pas commis de faute.

Lorsque les conditions de la responsabilité sont remplies à l’égard de plusieurs administrateurs, ceux-ci sont solidairement responsables envers le lésé. Il s’agit toutefois d’une solidarité différenciée. Chaque administrateur ne répond que dans la mesure où le dommage peut lui être imputé personnellement en raison de sa faute et au vu des circonstances. La solidarité différenciée permet aussi à chaque administrateur d’opposer au lésé les motifs de réduction de sa responsabilité. En pratique, le lésé ayant la qualité pour agir actionnera plusieurs, si ce n’est tous les responsables, dans un même procès et pour la totalité du dommage et demandera au juge de procéder à l’individualisation de la responsabilité[3].

La question de la qualité pour agir contre un administrateur en lien avec son devoir de gestion de la société a été longtemps controversée et a donné lieu à un certain nombre de décisions du Tribunal fédéral rendant le régime de la responsabilité des administrateurs très éparse[4].

En réaction aux critiques que ce régime a soulevées, le Tribunal fédéral a finalement résumé et précisé sa position dans un arrêt traitant de la qualité pour agir d’un créancier dans le cadre d’une faillite[5].

Il en ressort plusieurs distinctions importantes à opérer, en commençant par la notion de « dommage direct ou indirect » subi par l’actionnaire, le créancier ou la société. Il convient également d’effectuer une distinction selon que l’on se trouve dans le contexte d’une faillite ou non.

Cinq situations peuvent alors se présenter :

1 : Le dommage direct subi par l’actionnaire ou le créancier dans un contexte hors faillite ;

2 : Le dommage direct subi par la société et le dommage indirect subi par l’actionnaire dans un contexte hors faillite ;

3 : Le dommage direct subi uniquement par l’actionnaire ou le créancier dans le cadre d’une faillite ;

4 : Le dommage direct subi par la société et le dommage indirect subi par les créanciers dans le cadre d’une faillite ;

5 : Le dommage direct subi par la société et par le créancier dans le cadre d’une faillite.

Dans un contexte hors faillite, l’actionnaire ou le créancier directement lésé pourra intenter une action individuelle[6] (par opposition à l’action dite « sociale » dont il est fait mention ci-dessous) en réparation du préjudice subi du fait du comportement des administrateurs.
Le dommage est direct si le patrimoine de l’actionnaire ou du créancier est individuellement et spécifiquement affecté, cela indépendamment d’un dommage subi par la société.

Il sied de préciser que si les agissements des administrateurs sont aussi constitutifs d’un acte illicite, l’actionnaire ou le créancier peut agir concurremment selon les articles 41 CO ou 754 CO[7].

Toujours dans un contexte hors faillite, lorsque c’est la société qui subit un dommage, l’action en responsabilité contre un ou plusieurs administrateurs peut être intentée par la société elle‑même (action sociale)[8] ou par un actionnaire (action sociale oblique).
Dans le premier cas, la société directement lésée (dommage direct subi par la société) agira par son conseil d’administration. Toutefois, si tous les administrateurs sont visés par l’action, c’est alors à l’assemblée générale d’ouvrir action et de désigner un représentant ad hoc pour représenter la société, vu le conflit d’intérêt patent des administrateurs se trouvant dans une telle situation.

Dans le second cas, l’actionnaire (et non le créancier) qui subit un dommage indirect peut agir contre les administrateurs pour la réparation de son dommage indirect, soit en réparation du dommage direct subi par la société. Dans ce cas, l’actionnaire subit un dommage indirect (ou « par ricochet ») parce qu’il détient des actions de la société directement lésée. Dans le cadre de l’action sociale oblique, l’actionnaire doit conclure au paiement de dommages-intérêts à la société[9].

Cette institution permet notamment de protéger les intérêts de la société en palliant le conflit d’intérêt des administrateurs susmentionné, ces derniers ayant en pratique tendance à privilégier leurs propres intérêts au détriment de ceux de la société[10]. Toutefois, vu la lourdeur de la procédure, les coûts de l’action et les gains souvent minimes en cas d’issue favorable à l’action sociale oblique, (puisqu’ils ne portent généralement que sur une quote-part peu importante du capital) les actionnaires se retrouvent vite découragés d’entreprendre une telle action, ce qui la rend plutôt rare en pratique[11].

En ce qui concerne le créancier, ce dernier n’a pas la qualité pour agir dans un contexte hors faillite pour le dommage subi par la société. En effet, contrairement à l’actionnaire, le créancier ne détient pas d’actions de la société lésée et ne peut dès lors subir aucun dommage indirect. Il ne peut subir un dommage indirect que dans le cadre de la faillite de la société puisqu’il ne pourra pas récupérer, ou du moins pas entièrement, ses créances contre ladite société[12] (cf. situation 4).

En pratique la grande majorité des actions en responsabilité des administrateurs est intentée en cas de faillite de la société.

Dans le contexte d’une faillite, l’actionnaire ou le créancier qui subit un dommage direct consécutif aux agissements des administrateurs dispose de l’action individuelle en réparation de son dommage direct[13]. Toutefois, il convient d’être attentif au fait que cette action individuelle n’est ouverte à l’actionnaire ou au créancier directement lésé que lorsque seul son patrimoine est lésé. Si en revanche le patrimoine de la société est lui aussi lésé, alors l’action individuelle est soumise à d’importantes restrictions[14] ( situation 5).
Toujours dans le contexte d’une faillite, la société peut subir seule un dommage direct. Les créanciers ne seront quant à eux impactés qu’indirectement par les agissements des administrateurs puisqu’ils ne pourront pas récupérer, ou du moins pas entièrement, leurs créances contre ladite société dans le cadre de sa faillite[15] (dommage indirect ou « par ricochet »).
Dans une telle situation, l’action en responsabilité contre les administrateurs pour le dommage indirect subi par les créanciers (et pour le dommage direct subi par la société) n’appartient qu’à la masse en faillite étant donné que seule la société a la qualité de lésée directe[16]. Toutefois, la société étant en faillite il lui est impossible d’agir. Il appartiendra alors à la communauté des créanciers d’intenter l’action sociale[17]. Il s’agit là d’une action collective (et non individuelle) des créanciers dont la qualité de créancier ne peut être remise en cause si elle a été constatée sur la base d’un état de collocation entré en force[18].

L’action sociale est en principe menée par l’administration de la faillite[19] (art. 757 al. 1 CO). Cependant, si cette dernière renonce à l’exercer, un créancier peut alors lui-même introduire l’action tendant à la réparation du dommage direct subi par la société[20] (art. 757 al. 2 CO et art. 260 LP). Il convient de préciser que le créancier qui réclame la réparation du dommage direct subi par la société n’exerce pas une action individuelle[21] mais bien l’action sociale de la communauté des créanciers[22] ; il agit donc pour la masse en faillite. Contrairement à ce qui prévalait dans la jurisprudence antérieure, dans une telle situation le créancier ne dispose pas d’un droit individuel à la réparation du dommage indirect[23].

Lorsqu’il exerce l’action sociale pour la masse en faillite, le créancier bénéficie d’une certaine « priorité » en ce sens que l’éventuel produit de l’action servira en premier lieu à couvrir ses propres créances telles qu’elles ont été colloquées[24]. Le surplus sera ensuite réparti entre les autres créanciers selon leur rang.

En ce qui concerne les actionnaires, ces derniers ne peuvent pas à proprement parler agir en réparation du dommage indirect. En effet, le Tribunal fédéral a admis que les actionnaires peuvent agir en réparation de leur dommage indirect à condition que tous les créanciers soient désintéressés et que la faillite soit révoquée. Les administrateurs conservent ainsi une responsabilité qui s’étend au-delà du minimum nécessaire à désintéresser les créanciers. Dans ce cas, le droit des actionnaires d’agir à l’encontre des administrateurs ne constitue pas une exception stricto sensu étant donné que l’action intervient hors faillite[25].

Dans le contexte de la faillite, il se peut que la société et le créancier subissent un dommage direct. Pour cette situation spécifique, le Tribunal fédéral a instauré des règles qui visent à éviter la concurrence de l’action individuelle du créancier et de celle de l’administration de la faillite.
Le Tribunal fédéral a décidé de limiter le droit du créancier d’agir individuellement pour son dommage direct[26]. Ce dernier ne peut agir en réparation du dommage direct qu’il subit uniquement s’il peut fonder son action sur un comportement illicite de l’administrateur (sur la base de l’art. 41 CO)[27], sur une culpa in contrahendo[28] ou sur une disposition du droit des sociétés qui protège exclusivement les intérêts des créanciers[29]. Si en revanche la disposition du droit des sociétés protège à la fois les créanciers et la société, ce qui est notamment le cas des articles 725 alinéa 2 et 725a CO, l’action individuelle du créancier pour la réparation de son dommage direct n’est pas ouverte[30].

Il ressort de ce qui précède que dans le cadre de la faillite, lorsqu’un dommage direct est subi à la fois par un créancier et par la société, la priorité est largement accordée à cette dernière à travers l’action collective des créanciers ; l’action individuelle d’un créancier étant soumise à la condition supplémentaire susmentionnée.

En conclusion, les précisions apportées par le Tribunal fédéral dans son arrêt 132 III 564 sont bienvenues et ont été accueillies favorablement par la doctrine. À notre sens ces précisions ont notamment permis de condenser et de centraliser les solutions apportées aux questions relatives à la qualité pour agir à l’encontre d’un administrateur et ont simplifié en quelque sorte le régime complexe et précédemment éparse qui régissait ces diverses situations. Les solutions apportées par le Tribunal fédéral méritent d’être saluées en ce qu’elles nous semblent adaptées à la pratique. Seule la lourdeur des procédures et leur résultat parfois insuffisant voire décevant (comme pour le cas de l’action sociale oblique intentée par l’actionnaire qui ne détient qu’une quote-part peu importante du capital) constituent encore des obstacles importants à la popularité des actions que peuvent faire valoir les actionnaires et créanciers de la société à l’encontre de ses administrateurs.

À toutes fins utiles, le schéma produit ci-dessous expose sous la forme d’un organigramme le régime prévalant actuellement et faisant l’objet du présent article.

Michel BUSSARD

[1] Zen-Ruffinen Marie-Noëlle / Bauen Marc, Le conseil d’administration, 2017, ch. 4, p. 317.

[2] Arrêt du Tribunal fédéral 4A_467/2010, du 5 janvier 2011, c. 3.2 ; Arrêt du Tribunal fédéral 4A_373/2015, du 26 janvier 2016, c. 3.3 ;

[3] Zen-Ruffinen Marie-Noëlle / Bauen Marc, Le conseil d’administration, 2017, ch. 6, p. 318.

[4] ATF 117 II 432 ; ATF 122 III 176 ; ATF 127 III 374 ; ATF 128 III 180 ; ATF 131 III 306 ; ATF 132 III 342 ; Arrêt du Tribunal fédéral 4C.200/2002, du 13 novembre 2002, c. 3.

[5] ATF 132 III 564/568 ss. ; Cette décision a été confirmée à plusieurs reprises, cf. not. ATF 136 III 148 ; ATF 141 III 112 ; ATF 142 III 23 ; Arrêt du Tribunal fédéral 4A_174/2007, du 13 septembre 2007, c. 3.2.

[6] Zen-Ruffinen Marie-Noëlle / Bauen Marc, Le conseil d’administration, 2017, N 854, p. 330.

[7] Ibid, N 855-856.

[8] Arrêt du Tribunal fédéral 4A.174/2007, du 13 septembre 2007, c. 3.2.2.

[9] Cf. art. 756 al. 1 CO.

[10] Zen-Ruffinen Marie-Noëlle / Bauen Marc, Le conseil d’administration, 2017, N 860, p. 332.

[11] Ibid, N 861.

[12] ATF 128 III 180 ; ATF 131 III 306 ; ATF 132 III 564.

[13] Arrêt du Tribunal fédéral 4A.174/2007, du 13 septembre 2007, c. 3.2.1 ; ATF 131 III 306 ; ATF 132 III 564 ; ATF 142 III 23.

[14] Zen-Ruffinen Marie-Noëlle / Bauen Marc, Le conseil d’administration, 2017, N 864 et 873 ss, p. 333-334 et 337-338.

[15] ATF 132 III 564 ; Arrêt du Tribunal fédéral 4A.174/2007, du 13 septembre 2007, c. 3.2.1. ; Arrêt du Tribunal fédéral 4C.182/2006, du 12 décembre 2006, c. 3.1.

[16] Zen-Ruffinen Marie-Noëlle / Bauen Marc, Le conseil d’administration, 2017, N 866, p. 334 ; ATF 142 III 23 ; Arrêt du Tribunal fédéral 4A_603/2014, du 11 novembre 2015, c. 4.2.1.

[17] Ibid ; ATF 132 III 564 ; ATF 117 II 432 ; ATF 136 III 148 ; Arrêt du Tribunal fédéral 4A.174/2007, du 13 septembre 2007, c. 3.2.2.

[18] ATF 132 III 342.

[19] Arrêt du Tribunal fédéral 4A.174/2007, du 13 septembre 2007, c. 3.2.2. et 3.3.

[20] Arrêt du Tribunal fédéral 4A.174/2007, du 13 septembre 2007, c. 3.2.2. et 3.3. ; ATF 132 III 564 ; ATF 131 III 306.

[21] ATF 131 III 306 ; Arrêt du Tribunal fédéral 4C.182/2006, du 12 décembre 2006, c. 3.1. ; Arrêt du Tribunal fédéral 4C.363/2006, du 13 mars 2007, c. 5.1.

[22] ATF 132 III 564 ; Arrêt du Tribunal fédéral 4C.182/2006, du 12 décembre 2006, c. 3.1. ; Arrêt du Tribunal fédéral 4C.363/2006, du 13 mars 2007, c. 5.1.

[23] Zen-Ruffinen Marie-Noëlle / Bauen Marc, Le conseil d’administration, 2017, N 866, p. 335 et références citées.

[24] Arrêt du Tribunal fédéral 4A.174/2007, du 13 septembre 2007, c. 3.2.2. et 3.3. ; ATF 132 III 564 ; ATF 132 III 342 ; Arrêt du Tribunal fédéral 4C.182/2006, du 12 décembre 2006, c. 3.1.

[25] Zen-Ruffinen Marie-Noëlle / Bauen Marc, Le conseil d’administration, 2017, N 867, p. 335 et références citées.

[26] Arrêt du Tribunal fédéral 4A.174/2007, du 13 septembre 2007, c. 3.2.3. ; ATF 132 III 564 ; ATF 131 III 306.

[27] ATF 141 III 112.

[28] ATF 128 III 180 ; ATF 127 III 374 ; ATF 125 III 86 ; ATF 122 III 176.

[29] ATF 122 III 176 ; ATF 131 III 306 ; ATF 132 III 564.

[30] Zen-Ruffinen Marie-Noëlle / Bauen Marc, Le conseil d’administration, 2017, N 873, p. 337 et références citées.
Malgré l’importance certaine de cette institution, la réglementation de la responsabilité des administrateurs est en très grande partie jurisprudentielle. Proportionnellement au nombre important de mandats d’administrateurs, le nombre de jugements publiés reste toutefois relativement faible. Il ne faut cependant pas perdre de vue que la grande majorité des litiges relatifs à la responsabilité des administrateurs se règle par la voie transactionnelle[1].

Le principe de la responsabilité d’un administrateur est abordé principalement par le Code des obligations[2]. En effet, un administrateur peut voir sa responsabilité personnelle engagée à plusieurs titres. Nous citerons à titre d’exemples sa responsabilité d’auteur de prospectus d’émission (art. 752 CO), sa responsabilité en qualité de fondateur de la société (art. 753 CO) ou de liquidateur de celle-ci (art. 754 al. 1 CO). Le chef de responsabilité le plus courant en pratique restant toutefois celui rattaché à la qualité d’organe chargé de la gestion de la société (art. 754 al. 1 CO).

Il convient d’emblée de préciser qu’un administrateur peut aussi encourir une responsabilité pénale ainsi qu’une responsabilité en raison du manquement de la société dont il est administrateur dans le paiement des impôts ou des cotisations sociales.

L’article 754 alinéa 1 CO dispose que « les membres du conseil d’administration et toutes les personnes qui s’occupent de la gestion ou de la liquidation répondent à l’égard de la société, de même qu’envers chaque actionnaire ou créancier social, du dommage qu’ils leur causent en manquant intentionnellement ou par négligence à leurs devoirs ».

Il ressort de cette disposition que la responsabilité de l’administrateur est soumise aux quatre conditions de fond usuelles en matière de responsabilité[3]. L’administrateur doit d’abord avoir causé un dommage, soit une diminution involontaire de la fortune nette qui correspond à la différence entre le montant actuel du patrimoine du lésé et le montant qu’aurait ce même patrimoine si l’événement dommageable ne s’était pas produit. Le dommage peut se présenter sous la forme d’une diminution de l’actif, d’une augmentation du passif, d’une non-augmentation de l’actif ou d’une non-diminution du passif.

[1] Zen-Ruffinen Marie-Noëlle / Bauen Marc, Le conseil d’administration, 2017, N 816, p. 320.

[2] CO ; RS 220.

[3] ATF 127 III 453 ; ATF 113 II 52 ; Arrêt du Tribunal fédéral 4A_603/2014, du 11 novembre 2015, c. 4 ; Arrêt du Tribunal fédéral 4C.182/2006, du 12 décembre 2006, c. 3.3.

L’administrateur doit avoir causé ce dommage en violation de ses devoirs, ce qui correspond à l’exigence d’illicéité. Dans la plupart des cas, cela découle d’une violation des devoirs de diligence et de fidélité ou des devoirs résultant des tâches inaliénables et intransmissibles du conseil d’administration. À cet égard, il convient de préciser que le devoir de diligence est considéré comme respecté si la décision dommageable a été prise sur la base d’une information complète, au terme d’une procédure sérieuse, et si elle n’apparaît pas manifestement déraisonnable au moment où elle est prise. Dès lors, seule une analyse approfondie au cas par cas permettrait d’établir si cette condition est respectée ou pas.

Pour troisième condition, un lien de causalité adéquate doit pouvoir être constaté entre le comportement illicite de l’administrateur et le dommage.

Enfin, une faute doit pouvoir être reprochée à l’administrateur, cette dernière pouvant être retenue si l’administrateur n’a pas fait preuve de la diligence que l’on aurait pu attendre d’un administrateur modèle, diligent et raisonnable placé dans les mêmes circonstances[1]. La faute est toutefois présumée[2], ce qui renverse le fardeau de la preuve à cet égard. Il appartiendra en effet à l’administrateur de prouver qu’il a agi diligemment et qu’il n’a de ce fait pas commis de faute.

Lorsque les conditions de la responsabilité sont remplies à l’égard de plusieurs administrateurs, ceux-ci sont solidairement responsables envers le lésé. Il s’agit toutefois d’une solidarité différenciée. Chaque administrateur ne répond que dans la mesure où le dommage peut lui être imputé personnellement en raison de sa faute et au vu des circonstances. La solidarité différenciée permet aussi à chaque administrateur d’opposer au lésé les motifs de réduction de sa responsabilité. En pratique, le lésé ayant la qualité pour agir actionnera plusieurs, si ce n’est tous les responsables, dans un même procès et pour la totalité du dommage et demandera au juge de procéder à l’individualisation de la responsabilité[3].

La question de la qualité pour agir contre un administrateur en lien avec son devoir de gestion de la société a été longtemps controversée et a donné lieu à un certain nombre de décisions du Tribunal fédéral rendant le régime de la responsabilité des administrateurs très éparse[4].

En réaction aux critiques que ce régime a soulevées, le Tribunal fédéral a finalement résumé et précisé sa position dans un arrêt traitant de la qualité pour agir d’un créancier dans le cadre d’une faillite[5].

Il en ressort plusieurs distinctions importantes à opérer, en commençant par la notion de « dommage direct ou indirect » subi par l’actionnaire, le créancier ou la société. Il convient également d’effectuer une distinction selon que l’on se trouve dans le contexte d’une faillite ou non.

Cinq situations peuvent alors se présenter :

1 : Le dommage direct subi par l’actionnaire ou le créancier dans un contexte hors faillite ;

2 : Le dommage direct subi par la société et le dommage indirect subi par l’actionnaire dans un contexte hors faillite ;

3 : Le dommage direct subi uniquement par l’actionnaire ou le créancier dans le cadre d’une faillite ;

4 : Le dommage direct subi par la société et le dommage indirect subi par les créanciers dans le cadre d’une faillite ;

5 : Le dommage direct subi par la société et par le créancier dans le cadre d’une faillite.

  1. Dans un contexte hors faillite, l’actionnaire ou le créancier directement lésé pourra intenter une action individuelle[6] (par opposition à l’action dite « sociale » dont il est fait mention ci-dessous) en réparation du préjudice subi du fait du comportement des administrateurs.

Le dommage est direct si le patrimoine de l’actionnaire ou du créancier est individuellement et spécifiquement affecté, cela indépendamment d’un dommage subi par la société.

Il sied de préciser que si les agissements des administrateurs sont aussi constitutifs d’un acte illicite, l’actionnaire ou le créancier peut agir concurremment selon les articles 41 CO ou 754 CO[7].

  1. Toujours dans un contexte hors faillite, lorsque c’est la société qui subit un dommage, l’action en responsabilité contre un ou plusieurs administrateurs peut être intentée par la société elle‑même (action sociale)[8] ou par un actionnaire (action sociale oblique).

Dans le premier cas, la société directement lésée (dommage direct subi par la société) agira par son conseil d’administration. Toutefois, si tous les administrateurs sont visés par l’action, c’est alors à l’assemblée générale d’ouvrir action et de désigner un représentant ad hoc pour représenter la société, vu le conflit d’intérêt patent des administrateurs se trouvant dans une telle situation.

Dans le second cas, l’actionnaire (et non le créancier) qui subit un dommage indirect peut agir contre les administrateurs pour la réparation de son dommage indirect, soit en réparation du dommage direct subi par la société. Dans ce cas, l’actionnaire subit un dommage indirect (ou « par ricochet ») parce qu’il détient des actions de la société directement lésée. Dans le cadre de l’action sociale oblique, l’actionnaire doit conclure au paiement de dommages-intérêts à la société[9].

Cette institution permet notamment de protéger les intérêts de la société en palliant le conflit d’intérêt des administrateurs susmentionné, ces derniers ayant en pratique tendance à privilégier leurs propres intérêts au détriment de ceux de la société[10]. Toutefois, vu la lourdeur de la procédure, les coûts de l’action et les gains souvent minimes en cas d’issue favorable à l’action sociale oblique, (puisqu’ils ne portent généralement que sur une quote-part peu importante du capital) les actionnaires se retrouvent vite découragés d’entreprendre une telle action, ce qui la rend plutôt rare en pratique[11].

En ce qui concerne le créancier, ce dernier n’a pas la qualité pour agir dans un contexte hors faillite pour le dommage subi par la société. En effet, contrairement à l’actionnaire, le créancier ne détient pas d’actions de la société lésée et ne peut dès lors subir aucun dommage indirect. Il ne peut subir un dommage indirect que dans le cadre de la faillite de la société puisqu’il ne pourra pas récupérer, ou du moins pas entièrement, ses créances contre ladite société[12] (cf. situation 4).

En pratique la grande majorité des actions en responsabilité des administrateurs est intentée en cas de faillite de la société.

  1. Dans le contexte d’une faillite, l’actionnaire ou le créancier qui subit un dommage direct consécutif aux agissements des administrateurs dispose de l’action individuelle en réparation de son dommage direct[13]. Toutefois, il convient d’être attentif au fait que cette action individuelle n’est ouverte à l’actionnaire ou au créancier directement lésé que lorsque seul son patrimoine est lésé. Si en revanche le patrimoine de la société est lui aussi lésé, alors l’action individuelle est soumise à d’importantes restrictions[14] ( situation 5).
  1. Toujours dans le contexte d’une faillite, la société peut subir seule un dommage direct. Les créanciers ne seront quant à eux impactés qu’indirectement par les agissements des administrateurs puisqu’ils ne pourront pas récupérer, ou du moins pas entièrement, leurs créances contre ladite société dans le cadre de sa faillite[15] (dommage indirect ou « par ricochet »).

Dans une telle situation, l’action en responsabilité contre les administrateurs pour le dommage indirect subi par les créanciers (et pour le dommage direct subi par la société) n’appartient qu’à la masse en faillite étant donné que seule la société a la qualité de lésée directe[16]. Toutefois, la société étant en faillite il lui est impossible d’agir. Il appartiendra alors à la communauté des créanciers d’intenter l’action sociale[17]. Il s’agit là d’une action collective (et non individuelle) des créanciers dont la qualité de créancier ne peut être remise en cause si elle a été constatée sur la base d’un état de collocation entré en force[18].

L’action sociale est en principe menée par l’administration de la faillite[19] (art. 757 al. 1 CO). Cependant, si cette dernière renonce à l’exercer, un créancier peut alors lui-même introduire l’action tendant à la réparation du dommage direct subi par la société[20] (art. 757 al. 2 CO et art. 260 LP). Il convient de préciser que le créancier qui réclame la réparation du dommage direct subi par la société n’exerce pas une action individuelle[21] mais bien l’action sociale de la communauté des créanciers[22] ; il agit donc pour la masse en faillite. Contrairement à ce qui prévalait dans la jurisprudence antérieure, dans une telle situation le créancier ne dispose pas d’un droit individuel à la réparation du dommage indirect[23].

Lorsqu’il exerce l’action sociale pour la masse en faillite, le créancier bénéficie d’une certaine « priorité » en ce sens que l’éventuel produit de l’action servira en premier lieu à couvrir ses propres créances telles qu’elles ont été colloquées[24]. Le surplus sera ensuite réparti entre les autres créanciers selon leur rang.

En ce qui concerne les actionnaires, ces derniers ne peuvent pas à proprement parler agir en réparation du dommage indirect. En effet, le Tribunal fédéral a admis que les actionnaires peuvent agir en réparation de leur dommage indirect à condition que tous les créanciers soient désintéressés et que la faillite soit révoquée. Les administrateurs conservent ainsi une responsabilité qui s’étend au-delà du minimum nécessaire à désintéresser les créanciers. Dans ce cas, le droit des actionnaires d’agir à l’encontre des administrateurs ne constitue pas une exception stricto sensu étant donné que l’action intervient hors faillite[25].

  1. Dans le contexte de la faillite, il se peut que la société et le créancier subissent un dommage direct. Pour cette situation spécifique, le Tribunal fédéral a instauré des règles qui visent à éviter la concurrence de l’action individuelle du créancier et de celle de l’administration de la faillite.

Le Tribunal fédéral a décidé de limiter le droit du créancier d’agir individuellement pour son dommage direct[26]. Ce dernier ne peut agir en réparation du dommage direct qu’il subit uniquement s’il peut fonder son action sur un comportement illicite de l’administrateur (sur la base de l’art. 41 CO)[27], sur une culpa in contrahendo[28] ou sur une disposition du droit des sociétés qui protège exclusivement les intérêts des créanciers[29]. Si en revanche la disposition du droit des sociétés protège à la fois les créanciers et la société, ce qui est notamment le cas des articles 725 alinéa 2 et 725a CO, l’action individuelle du créancier pour la réparation de son dommage direct n’est pas ouverte[30].

Il ressort de ce qui précède que dans le cadre de la faillite, lorsqu’un dommage direct est subi à la fois par un créancier et par la société, la priorité est largement accordée à cette dernière à travers l’action collective des créanciers ; l’action individuelle d’un créancier étant soumise à la condition supplémentaire susmentionnée.

En conclusion, les précisions apportées par le Tribunal fédéral dans son arrêt 132 III 564 sont bienvenues et ont été accueillies favorablement par la doctrine. À notre sens ces précisions ont notamment permis de condenser et de centraliser les solutions apportées aux questions relatives à la qualité pour agir à l’encontre d’un administrateur et ont simplifié en quelque sorte le régime complexe et précédemment éparse qui régissait ces diverses situations. Les solutions apportées par le Tribunal fédéral méritent d’être saluées en ce qu’elles nous semblent adaptées à la pratique. Seule la lourdeur des procédures et leur résultat parfois insuffisant voire décevant (comme pour le cas de l’action sociale oblique intentée par l’actionnaire qui ne détient qu’une quote-part peu importante du capital) constituent encore des obstacles importants à la popularité des actions que peuvent faire valoir les actionnaires et créanciers de la société à l’encontre de ses administrateurs.

À toutes fins utiles, le schéma produit ci-dessous expose sous la forme d’un organigramme le régime prévalant actuellement et faisant l’objet du présent article.

Michel BUSSARD

[1] Zen-Ruffinen Marie-Noëlle / Bauen Marc, Le conseil d’administration, 2017, ch. 4, p. 317.

[2] Arrêt du Tribunal fédéral 4A_467/2010, du 5 janvier 2011, c. 3.2 ; Arrêt du Tribunal fédéral 4A_373/2015, du 26 janvier 2016, c. 3.3 ;

[3] Zen-Ruffinen Marie-Noëlle / Bauen Marc, Le conseil d’administration, 2017, ch. 6, p. 318.

[4] ATF 117 II 432 ; ATF 122 III 176 ; ATF 127 III 374 ; ATF 128 III 180 ; ATF 131 III 306 ; ATF 132 III 342 ; Arrêt du Tribunal fédéral 4C.200/2002, du 13 novembre 2002, c. 3.

[5] ATF 132 III 564/568 ss. ; Cette décision a été confirmée à plusieurs reprises, cf. not. ATF 136 III 148 ; ATF 141 III 112 ; ATF 142 III 23 ; Arrêt du Tribunal fédéral 4A_174/2007, du 13 septembre 2007, c. 3.2.

[6] Zen-Ruffinen Marie-Noëlle / Bauen Marc, Le conseil d’administration, 2017, N 854, p. 330.

[7] Ibid, N 855-856.

[8] Arrêt du Tribunal fédéral 4A.174/2007, du 13 septembre 2007, c. 3.2.2.

[9] Cf. art. 756 al. 1 CO.

[10] Zen-Ruffinen Marie-Noëlle / Bauen Marc, Le conseil d’administration, 2017, N 860, p. 332.

[11] Ibid, N 861.

[12] ATF 128 III 180 ; ATF 131 III 306 ; ATF 132 III 564.

[13] Arrêt du Tribunal fédéral 4A.174/2007, du 13 septembre 2007, c. 3.2.1 ; ATF 131 III 306 ; ATF 132 III 564 ; ATF 142 III 23.

[14] Zen-Ruffinen Marie-Noëlle / Bauen Marc, Le conseil d’administration, 2017, N 864 et 873 ss, p. 333-334 et 337-338.

[15] ATF 132 III 564 ; Arrêt du Tribunal fédéral 4A.174/2007, du 13 septembre 2007, c. 3.2.1. ; Arrêt du Tribunal fédéral 4C.182/2006, du 12 décembre 2006, c. 3.1.

[16] Zen-Ruffinen Marie-Noëlle / Bauen Marc, Le conseil d’administration, 2017, N 866, p. 334 ; ATF 142 III 23 ; Arrêt du Tribunal fédéral 4A_603/2014, du 11 novembre 2015, c. 4.2.1.

[17] Ibid ; ATF 132 III 564 ; ATF 117 II 432 ; ATF 136 III 148 ; Arrêt du Tribunal fédéral 4A.174/2007, du 13 septembre 2007, c. 3.2.2.

[18] ATF 132 III 342.

[19] Arrêt du Tribunal fédéral 4A.174/2007, du 13 septembre 2007, c. 3.2.2. et 3.3.

[20] Arrêt du Tribunal fédéral 4A.174/2007, du 13 septembre 2007, c. 3.2.2. et 3.3. ; ATF 132 III 564 ; ATF 131 III 306.

[21] ATF 131 III 306 ; Arrêt du Tribunal fédéral 4C.182/2006, du 12 décembre 2006, c. 3.1. ; Arrêt du Tribunal fédéral 4C.363/2006, du 13 mars 2007, c. 5.1.

[22] ATF 132 III 564 ; Arrêt du Tribunal fédéral 4C.182/2006, du 12 décembre 2006, c. 3.1. ; Arrêt du Tribunal fédéral 4C.363/2006, du 13 mars 2007, c. 5.1.

[23] Zen-Ruffinen Marie-Noëlle / Bauen Marc, Le conseil d’administration, 2017, N 866, p. 335 et références citées.

[24] Arrêt du Tribunal fédéral 4A.174/2007, du 13 septembre 2007, c. 3.2.2. et 3.3. ; ATF 132 III 564 ; ATF 132 III 342 ; Arrêt du Tribunal fédéral 4C.182/2006, du 12 décembre 2006, c. 3.1.

[25] Zen-Ruffinen Marie-Noëlle / Bauen Marc, Le conseil d’administration, 2017, N 867, p. 335 et références citées.

[26] Arrêt du Tribunal fédéral 4A.174/2007, du 13 septembre 2007, c. 3.2.3. ; ATF 132 III 564 ; ATF 131 III 306.

[27] ATF 141 III 112.

[28] ATF 128 III 180 ; ATF 127 III 374 ; ATF 125 III 86 ; ATF 122 III 176.

[29] ATF 122 III 176 ; ATF 131 III 306 ; ATF 132 III 564.

[30] Zen-Ruffinen Marie-Noëlle / Bauen Marc, Le conseil d’administration, 2017, N 873, p. 337 et références citées.

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